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L'ouvrage d'Emma Jung "Animus et Anima" est disponible au format livre de poche dans une nouvelle traduction aux éditions La Fontaine de Pierre.
Il s'agit donc d'un nouveau livre, le précédent, édité en 1981 aux éditions Seghers, a nécessité une retraduction complète pour se tenir au plus près du texte original publié en allemand.
Voici quelques extraits de l'ouvrage :
"Exercer une activité intellectuelle, concrète et masculine ne semble pas suffisant: on peut le constater chez de nombreuses femmes qui ont par exemple réussi leurs études et exercent une profession intellectuelle et masculine, mais qui, en dépit de cela, n'arrivent pas à faire bon ménage avec leur animus. En effet, une formation et une carrière masculines peuvent très bien conduire à une identification avec l'animus, qui neutralise alors le féminin.
Il est important que la spiritualité féminine — le logos chez la femme — soit intégrée à sa nature et à son existence pour qu'une coopération harmonieuse entre le féminin et le masculin voie le jour et qu'une partie de la personnalité ne soit pas condamnée à vivre dans l'ombre." (Page 34)
"L'animus a une manière très particulière de se manifester, non pas en tant que personnage, mais plutôt sous la forme de parole (le logos signifie aussi la parole), de voix qui commente toutes les situations dans lesquelles nous pouvons nous trouver, ou qui nous dicte des règles de comportement.
C'est souvent sous cette forme que l'animus commence par être perçu comme une entité distincte du moi, bien avant qu'il ne se cristallise sous les traits d'un personnage. D'après mes observations, cette voix s'exprime surtout dans deux registres différents.
En premier lieu, elle donne des appréciations critiques, principalement négatives, de chacune de nos velléités d'action, elle examine en détail nos mobiles et nos intentions, ce qui provoque naturellement un sentiment d'infériorité et peut même étouffer dans l'œuf toute envie de nous exprimer. En alternance, la même voix prodigue parfois des louanges excessives, et la conséquence de ces jugements extrêmes est de nous faire osciller constamment entre la conscience d'une nullité absolue et un sentiment exalté de notre propre valeur.
Dans son deuxième registre, cette voix donne presque exclusivement des ordres et formule des interdictions, ou répète des lieux communs. Deux aspects importants de la fonction du logos semblent s'exprimer ici : d'une part la discrimination, le jugement et la connaissance, d'autre part l'abstraction et la formulation de lois générales." (Page 45)
"En dehors d'actions spécifiques de ce genre, l'animus peut et doit aussi, d'une manière générale, nous aider à reconnaître et à examiner les faits et les situations de façon impersonnelle, objective et raisonnable. La femme réagit souvent de façon trop immédiate et subjective, si bien que cette aide de l'animus est précieuse et lui est aussi très utile dans son domaine de prédilection, celui des relations humaines.
Sa propre composante masculine l'aide par exemple à comprendre les hommes. J'insisterai ici sur le point suivant : s'il est vrai que l'animus, quand il agit de façon autonome, avec son «objectivité» déplacée, est un obstacle aux relations humaines, il est également vrai qu'une attitude plus objective et impersonnelle favorise l'épanouissement de la femme.
L'énergie de l'animus ne nourrit pas seulement les activités masculines et
intellectuelles, elle permet surtout le développement d'une attitude spirituelle qui nous fait sortir des limites et des préjudices d'un point de
vue personnel trop étroit." (Page 77)
"En réalité, l'alternative n'est pas, pour l'homme, de se mettre totalement au service de la maîtresse anima ou de perdre tout contact avec elle : il doit uniquement accorder un certain espace vital au principe féminin, car ce principe appartient à sa propre nature. C'est ce qu'il fait quand il reconnaît et concrétise l'éros, le principe de relation : dans ce cas, non seulement il perçoit ses propres sentiments, mais il en fait usage, car l'établissement et surtout la préservation d'une relation nécessitent un jugement de valeur, et c'est justement ce que procure le sentiment.
Par nature, l'homme a tendance à établir des relations avec des choses, par exemple son travail ou un autre domaine d'intérêt, tandis que la femme valorise plutôt les relations personnelles, ce qui est aussi le cas de l'anima. C'est la raison pour laquelle celle-ci cherche à impliquer l'homme et lui rend de précieux services en créant des liens. Elle ne peut toutefois le faire que lorsque l'élément féminin est intégré à la conscience : tant qu'il agit de façon autonome, il perturbe les relations ou les rend impossibles." (Page 151)
"L'intégration de l'anima, c'est-à-dire l'assimilation de l'élément féminin par la personnalité consciente de l'homme, fait partie du processus d'individuation. À cet égard, il faut tenir compte d'un point d'une importance particulière : l'élément féminin qui doit être intégré à la personnalité n'est qu'une partie de l'anima ; c'est son aspect personnel. Car l'anima représente en même temps l'archétype du féminin, dont la nature est supra-personnelle et ne peut donc pas être intégrée." (Page 159)
Les recherches de C.G. Jung ont mis en évidence l'existence d'images ou de figures caractéristiques qui émergent en tout temps et en tout lieu, rappelle Emma Jung dans son introduction : le héros, le monstre, le magicien, la sorcière, l'enfant, etc. Jung nomme ces figures des « images primordiales ou archétypes », car ce sont des représentations tout à fait universelles et intemporelles.
«Parmi ces archétypes, dit-elle, il en est surtout deux auxquels on accorde une importance particulière, car ils font partie de la personnalité tout en prenant racine dans l'inconscient collectif et ils forment une sorte de lien ou de passerelle entre le personnel et l'impersonnel, entre le conscient et l'inconscient. Jung a nommé ces deux figures - l'une masculine et l'autre féminine - l'animus et l'anima.»
L'animus est la composante masculine de l'inconscient de la femme, et l'anima la composante féminine de l'inconscient de l'homme. À l'aide de contes et de légendes, grâce aussi à son propre vécu de femme, à son expérience d'analyste, l'auteure entre dans les subtilités de la relation entre l'homme et la femme ; et elle montre que cette relation dépend aussi du lien qui se crée, à l'intérieur de soi, entre le masculin et le féminin. Sous la plume d'Emma Jung, la rencontre avec l'animus (pour une femme) et avec l'anima (pour un homme) semble être un processus naturel.
Emma Jung-Rauschenbach (1882-1955), la femme de C.G. Jung, a su partager sa vie entre sa famille (cinq enfants sont nés de leur union) et son travail. Très vite elle s'est trouvée associée aux recherches de Jung, à ses activités. Elle devint analyste, puis, quand l'Institut C.G. Jung de Zurich s'est créé, elle y donna de nombreux cours et en fut la vice-présidente jusqu'à sa mort.
Cet ouvrage est tiré d'une conférence donnée par Emma
Jung
au Club Psychologique de Zürich en 1931.
Voir également Emma Jung, les deux ouvrages :
cgjung.net © 1998 -
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