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Jean-Claude Jugon démontre que le langage est structuré comme l’inconscient, car il lui est antérieur. Il nous invite à renverser l’aphorisme de Jacques Lacan "l'inconscient est structuré comme un langage".
Voici quelques extraits de son étude :
Avancées des neurosciences
"Si les neurosciences ont fait d’importantes avancées sur la connaissance de l’encéphale, il est douteux au final qu’elles puissent y circonscrire cette petite voix de l’ange, porte-parole de l’instinct religieux et de la foi incarnée, qui dans toutes les cultures se sont révélés en secret au coeur humain pour manifester à travers des symboles numineux son aspiration à la spiritualité." (P 7)
Télécharger l'étude complète au format pdf (33 pages)
"Au regard du rôle du rêve dans le psychisme selon Freud (gardien du sommeil, maquillage dû à la censure, réalisation du désir), son analyse du phénomène onirique est aujourd’hui par malheur devenue globalement obsolète car démentie par les avancées des neurophysiologistes.
C’est hélas une des dures leçons de la science que d’invalider nos certitudes. On sait ainsi que les mammifères et les oiseaux « rêvent » aussi, sans parler du fœtus en fin de gestation qui présente un sommeil agité équivalent au sommeil paradoxal de l’adulte." (P 14)
"Si l’inconscient n’a pas le même pouvoir discriminant que le conscient, il est en revanche plus vaste et, de toute évidence, il le précède de loin dans l’épigénèse de l’appareil psychique. On doit donc s’attendre à trouver une réduplication de sa structure bipolaire dans l’instance du conscient, notamment via le langage et la fonction de pensée, faculté spécifiquement humaine." (P 16)
"Le calembour [...] porte non sur la polysémie du mot en tant que tel mais sur une vraie homonymie entre deux mots. Dans la polysémie, un même
signifiant a plusieurs significations ou bien une même idée est rendue par plusieurs signifiants.
Ainsi, la pompe est un appareil destiné à déplacer un liquide grâce à un mouvement alternatif
vertical. Mais, dans le français populaire, c’est aussi une chaussure car la marche reproduit un
mouvement identique, facilitant aisément une association d’idées par déplacement sémantique.
[...]
Le calembour peut aussi porter sur la décomposition d’un mot en ses phonèmes pour dégager à partir d’eux d’autres mots afin de donner au premier un tout autre sens. On sait le parti et l’abus que Lacan en a tiré. Ex : le père-sévère, les non-dupes-errent, etc. Ce procédé, fréquent dans les rêves, offre la possibilité d’une résurgence du sens derrière l’encodage métonymique.
La paire d’yeux peut ainsi devenir le Père-Dieu, Sylvie s’il vit et Dominique d’homme inique. Tout cela n’est pas nouveau. Il s’agit de la langue des oiseaux qui selon divers procédés joue sur les sons, les lettres et le sens pour énoncer un discours herméneutique à la manière du rêve. Cela rejoint l’aspect paradoxal et polysémique du symbole. Les oiseaux sont les messagers des dieux par leur façon de voler et leurs cris. Les troubadours, alchimistes ou cabalistes ont encodé leur message en les condensant par cryptage pour qu’on les décode métaphoriquement." (P 18)
"L'essor du vivant nous invite à poser l’antériorité de l’inconscient sur le conscient.
Dans le règne animal, il existe déjà des stratégies communicationnelles (encodage/décodage),
cognitives et sociales, qui révèlent les capacités de l’encéphale à sémantiser
et syntaxiser pour délivrer un message, en particulier chez les mammifères, classe à laquelle l’homme appartient.
[...]
Les mammifères évolués, les singes surtout, possèdent cette intelligence car ils sont pourvus
d’affects leur donnant une compréhension des choses par le sentiment. Le chimpanzé, proche
cousin de l’homme, est un primate qui a ainsi de réelles capacités de compréhension dans les
opérations simples d’encodage et de décodage d’un message quand l’affectivité est sollicitée.
Certes, le chimpanzé n’a pas accès à la voix intérieure, à l’endophasie, mais il est très capable néanmoins d’une activité endopsychique qui ne relève pas que de l’instinct.
Alors, est-ce qu’il n’existe pas chez nos frères les animaux une faculté de représentation, une certaine capacité à associer des images, à tisser des liens de sens, même fragmentaires, entre un perçu immédiat et un vécu subjectif ? Sont-ils totalement dépourvus d’inconscient à cause de la barrière du langage ? Ne savent-ils pas communiquer dans leur propre culture naturelle, même s’il existe une barrière génétique qui les frustre du langage articulé propre à l’humain ?
Même si le langage et la pensée sont des néoformations récentes dans l’évolution de la psyché humaine, il est clair que l’encéphalisation de leurs capacités existe déjà dans le règne animal. Elles dépendent en fait de la structure double de l’inconscient, bipolarisée comme le cerveau.
Il s’ensuit que l’inconscient n’est pas structuré comme un langage mais que le langage est structuré comme l’inconscient, car il lui est antérieur. Il faut renverser l’aphorisme de Lacan." (P 22)
"Pour Freud, ce sont les restes diurnes ou événements récents qui forment la matière première du rêve. Aussi n’y voit-on presque jamais de grands symboles à l’oeuvre. Il faut le décrypter pour trouver un sens sexuel caché par le travail du rêve via la condensation et le déplacement. Cette optique est entièrement causaliste, tournée vers le passé, ce qui ne l’invalide nullement.
Jung adhère en gros à cette vision compensatoire et causaliste qui veut rééquilibrer au présent les désirs insatisfaits du moi conscient. Mais il ajoute aussi au rêve une fonction anticipatrice et finaliste, tournée vers l’avenir. Aiguillonné par l’intuition, le rêve veut dépasser les strictes conditions du présent et du passé pour anticiper le devenir du sujet, si jamais il le comprend…
Jung dit ainsi : «Distinguons la fonction prospective du songe de sa fonction compensatrice. [Celle ci] représente une autorégulation de l’organisme psychique. La fonction prospective, au contraire, se présente sous la forme d’une anticipation de l’activité consciente future ; elle évoque une ébauche préparatoire, une esquisse à grandes lignes, un projet de plan exécutoire. Son contenu symbolique renferme, à l’occasion, la solution d’un conflit. » (L'homme à la découverte de son âme p. 213)." (P 26)
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les essais de tropologie - Jean-Claude JUGON Juin 2019
(33 pages au format pdf)
Cet hommage à Jean-Claude Jugon retrace son parcours et ses travaux de recherche.
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