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Jean-Claude Jugon nous permet de mieux appréhender l'âme japonaise. Pour cela il s'appuie sur la typologie de C.G. Jung (introversion / extraversion et les quatre fonctions) et démontre qu'elle s'applique aux études transculturelles.
La lecture de cet ouvrage offre deux avantages :
Les extraits ci-dessous donnent un aperçu du contenu de l'ouvrage.
Pour en savoir plus, lire le document Comment fonctionne la psyché selon la psychologie de C.G. Jung (pdf 13 pages). |
"Le moi est une néoformation psychique assez récente dans l'évolution de l'appareil mental humain. Il émergea lentement de l'inconscient, comme une coquille de noix flottant sur un immense océan, tiraillé de partout par des motions pulsionnelles contradictoires et traversé par des symboles numineux subjuguants.
L'inconscient est un réservoir énergétique tant par les instincts vitaux qui agitent le vécu du corps que par les archétypes qui sémantisent la psyché de représentations (liées audit vécu). Matrice préformatrice du moi, il représente symboliquement une sorte de mare nostrum (ou le monde des mères) en raison de son antériorité et de l'histoire immémoriale engrammée dans le cerveau constituée depuis les origines de la vie.
Il s'ensuit que le moi entretient une phobie de l'inconscient par peur de se voir un jour réenglouti dans ses abîmes. Cependant, au cours de l'évolution de l'appareil mental, il a réussi à se hisser hors de ces eaux primordiales pour respirer à l'air libre et trouver une certaine autonomie de corps et d'esprit." P 223
"Chaque être humain pris dans la marche du temps est soumis à des changements individuels incessants qui obligent sa personnalité à évoluer ou involuer. En revanche, le caractère reste fixe la vie durant. On n'en change pas pour la simple raison que l'attitude intérieure qui lui sert de base n'est pas modifiable.
Congénitalement, on est plutôt extraverti ou plutôt introverti. Il faudrait remplacer son patrimoine génétique par un autre pour troquer de caractère. Ce donné à la naissance va nous suivre toute la vie.
Cependant, le caractère peut être gauchi par une éducation contrariant trop la nature innée de l'enfant, l'obligeant à vivre des expériences contraires à ses dispositions profondes. En porte-à-faux avec son caractère, il ressent son vécu comme trop inauthentique face à ce que sa famille lui inculque. Le caractère peut aussi être biaisé par des traumatismes particuliers vécus dans l'enfance, sans lien direct avec l'éducation parentale." P. 53
"Comme la sensation alimente l'inconscient en perceptions subliminales, elle est aussi capable de sentir avec plus ou moins de netteté l'état actuel de l'entourage dans lequel elle baigne sans recourir forcément à la perception avérée. Aucune donnée objective ne parvient directement aux organes des sens et pourtant le corps discerne en lui quelque chose qui ne correspond pas à l'atmosphère habituelle sans que le sujet en connaisse la vraie raison. C'est physique !
[...] la sensation s'enracine très profondément dans l'inconscient. Irrationnelle de surcroît, elle peut avoir du flair et connaître des choses sans passer par la médiation du conscient. Elle sait à l'instant même ce qui se passe ici même. Cette communication directe, d'inconscient à inconscient, s'établit souvent entre les gens.
Mais, à l'inverse de l'intuition, elle a besoin d'un objet dans une situation présente pour bien sentir les arrière-plans de la psyché. L'intuition, elle, se passe de tout objet réel et ne vise que le futur. Ces deux fonctions prêtent facilement à confusion par leur mode immédiat de perception et leur alogisme.
La sensation se charge toutefois du rôle de révélateur et de fixateur de toutes les formes de perception. On ne pourrait rien connaître de ce monde et de nous-mêmes sans elle. Les autres fonctions, formées dans son creuset, ne peuvent donc se passer de ses données et s'y alimentent constamment. Toute expérience issue d'une autre fonction que la sensation y retournera pour être perçue et enregistrée comme ayant eu lieu dans le hic et nunc du sensible. Même l'intuition a besoin de sa capacité de stockage informationnel qu'elle réutilise à son profit pour pressentir l'avenir." P 69.
"Le jugement rationnel du sentiment se manifeste clairement lorsqu'on affirme d'une chose, après mûre réflexion, que : tel est mon sentiment.
On notera au passage la différence de profondeur, de détermination et aussi de permanence entre cette assertion et celle de la sensation qui modestement dit : telle est mon impression. On comparera aussi avec les affirmations plus ou moins péremptoires de la pensée qui déclare : telle est mon opinion.
Veut-on dire que l'on juge en son âme et conscience, c'est après avoir soupesé par le sentiment la valeur du pour et du contre puis avoir mis cette estimation en balance avec différents arguments critiques de la pensée pour aboutir à une conclusion en forme de conviction intime (ce n'est pas dire une vérité).
Le sentiment nous force à l'authenticité, dans le sens de ce qui paraît faire le plus grand sens pour nous et pour lui. Il possède tant d'énergie qu'il est le starter de toute motivation." P 80.
"On dira volontiers je pense que pour affirmer avec force son sentiment alors que le doute est l'une des caractéristiques essentielles de la pensée. À l'inverse, on dira je crois que en laissant planer un peu d'indécision pour faire état d'une pensée alors que la conviction relève du sentiment.
Ces fréquentes confusions et permutations triangulaires entre l'intuition et la sensation, le sentiment et la pensée ou l'intuition et le sentiment montrent que les fonctions s'articulent entre elles pour compenser leurs différences et tamponner leurs oppositions afin de maintenir la psyché dans un équilibre relatif.
En principe, on ne les voit pas à l'œuvre isolément. Leur distinction est pratique pour l'entendement mais en réalité superflue car si chacune agit particulièrement, elles interagissent toutes conjointement au service du moi.
Ce n'est que dans les cas pathologiques, quand une fonction devient trop exclusive et néglige les autres, que leur mode d'action apparaît clairement dans l'anormalité d'un comportement (suite à la compensation de l'inconscient), qui peut aller jusqu'à renverser la tendance en son contraire." P 126.
Schéma page 98 - Organisation de la psyché selon C.G. Jung
"L'homme sapiens commence à penser machinalement puis devient peu à peu sapiens sapiens : il sait désormais qu'il sait puisqu'il peut se le dire mentalement. C'est une co-naissance par la connaissance : le sujet peut enfin s'introspecter via la pensée réflexive.
Le lien entre la frustration affective et l'activité du penser qui remplace la chose absente par des mots est difficile à clarifier. Toutefois, plus un être se sent frustré dans ses besoins vitaux, plus il est obligé de se servir de la pensée pour com-penser. C'est une loi qui tient aux liens organiques que ces deux fonctions entretiennent et à leur filiation psychogénétique.
À l'inverse, un être comblé de bonheur, si cela pouvait exister, n'aurait nulle envie de réfléchir. En général, les enfants trop satisfaits du point de vue sensitivo-affectif par un milieu surgratifiant investissent assez peu prioritairement la fonction de pensée une fois adulte." P 47.
"À l'heure du choc des civilisations et de la surpopulation, le besoin d'une caractérologie anthropologique souple et raisonnée fondée sur la structure et le fonctionnement de la psyché (et ses tendances psychologiques), pouvant expliquer les différences de mentalité, se fait de plus en plus sentir pour aider les hommes à mieux se comprendre.
Ce sont bien plus des oppositions de caractère qui dressent les peuples entre eux que des conflits inconscients qui d'une culture à l'autre finissent par se ressembler.
[...] Le phénomène culturel résulte largement d'une confrontation du moi avec l'inconscient collectif. Une communauté d'individus en rend compte dans sa version des faits qui fonde l'ossature de sa culture. Les différences constatées reflètent une divergence de point de vue dans la déclaration des témoins, chaque peuple privilégiant certains aspects de la psyché humaine au détriment d'autres." P 132.
"S'il faut trouver du sujet au Japon, celui que tout le monde cherche, c'est bien dans le corps qu'il se cache. C'est lui qui porte presque toute l'introversion parce que dans la psyché nippone la sensation est la mieux différenciée des quatre fonctions psychologiques.
L'Archipel a fondé sa culture en s'appuyant principalement sur elle pour produire une esthétique pleine d'alacrité, mise simplement en liberté. A l'inverse des Occidentaux, trop préoccupés par les démons de la chair, les Japonais ont su trouver du sacré dans le corps. Certes, comme la sensation est une fonction irrationnelle, l'entendement ne s'en empare pas pour gloser ou fonder des dogmes. Il s'agit plutôt d'une saine disposition à percevoir le beau dans le quotidien le plus terrestre, fut-ce un insecte sur un brin d'herbe, pour le rendre saint de vie.
[...] Au fond, tous les arts nippons reflètent cette beauté éphémère de l'instant qu'il faut saisir comme une condensation de l'éternité. Le sublime est dans la reconstruction d'une simplicité travaillée de l'intérieur. La légèreté, la fugacité, finissent donc par ouvrir des horizons insoupçonnés de détente et de bien-être en remisant au placard l'oppression physique du compact. À force d'élaguer pour atteindre l'essentiel, seule reste la quintessence. Les beaux-arts et la vie quotidienne aussi en sont traversés." P206.
"Au final, l'application de la typologie junguienne au cas de l'âme japonaise apporte bien des élucidations à ce sujet, prouvant la validité de sa description de l'appareil mental humain (conscient et inconscient).
Pour résumer, disons que la dimension d'extraversion et le statut de l'objet dominent largement dans la psyché nippone, au détriment de l'introversion et d'une référence au sujet, tandis que les fonctions proximales de sensation et de sentiment (liées à la spatialité et au présent) semblent mieux différenciées que celles distales de pensée et d'intuition (liées à la temporalité).
Elles sont plus introverties, c.-à-d. plus nettement affiliées au sujet, en particulier la sensation qui dans la culture japonaise domine largement sur les trois autres fonctions. Ainsi, au lieu de déclarations universelles émises avec force par la pensée, on trouve des confidences privées chuchotées par le sentiment ; en place des visions prophétiques de l'intuition, se tient une poétique du corps. N'est-ce pas aussi en ces domaines que le Japon a de fait quelque chose à enseigner au monde ?" P 235.
En complément de l'ouvrage ci-dessus, Jean-Claude Jugon met à la disposition des internautes le texte suivant : Le dialogue du sentiment et de la pensée dans l'âme japonaise (format pdf). Ce texte a été publié initialement dans la revue universitaire Ronsô Gendaigo Gendai Bunka de l'Université de Tsukuba au Japon (2015).
PREMIÈRE PARTIE : PETIT TRAITÉ DE PSYCHOLOGIE ANALYTIQUE
Pour une métapsychologie d’inspiration junguienne
Structure et caractéristiques de la psyché selon Jung
Jung avant-gardiste
L’inconscient bipolaire : introversion et extraversion en compensation
Attitude et comportement s’accordent dans une conduite
Introversion et extraversion : quelques propriétés
Type extraverti : attitude générale et relativisation comportementale
Type introverti : attitude générale et relativisation comportementale
Les fonctions psychologiques dans la psyché humaine
Pourquoi quatre fonctions psychologiques ?
Localisation neuroanatomique des fonctions psychologiques
Caractère et personnalité : structure psychique et complexes individuels
La fonction d’intuition
La fonction de sensation
La fonction de sentiment
La fonction de pensée
Structure de la psyché humaine selon Carl Gustav Jung
Accordage des fonctions du moi : synergie et antagonisme
Synergie de la sensation et du sentiment
Synergie de l’intuition et de la pensée
Synergie de la sensation et de la pensée
Antagonisme de la sensation et de l’intuition
Antagonisme de la pensée et du sentiment
Antagonisme de l’intuition et du sentiment
Couplage des fonctions : dominance et récessivité
Pour une psychologie des tendances : de l’absolu au relatif
Pour une transculturalité d’inspiration junguienne
DEUXIÈME PARTIE : ANIMA NIPPONICA
Pour une meilleure compréhension de l’âme japonaise
Le temps et l'espace au Japon
Avant-propos
Représentations et vécu du temps au Japon
Représentations et vécu de l’espace au Japon
Résumé
Attitude et comportement chez les japonais
Les fonctions psychologiques dans la psyché japonaise
La fonction de pensée : versant introverti / versant extraverti
La fonction d’intuition : versant introverti / versant extraverti
Résumé des fonctions distales
La fonction de sentiment : versant introverti / versant extraverti
La fonction de sensation : versant introverti / versant extraverti
Résumé des fonctions proximales
Le moi dans la psyché japonaise
Les tendances du moi dans l’âme japonaise
Configuration psychologique du moi japonais
De l'identification dans l'âme japonaise
Identification à la nature
Identification au groupe
Identification à la victime
Conclusion - Notes - Bibliographie
Les 287 notes qui figurent à la fin de l'ouvrage ne sont pas que des références bibliographiques mais développent pour beaucoup d'autres thématiques en lien avec son contenu.
Cet hommage à Jean-Claude Jugon retrace son parcours et ses travaux de recherche.
cgjung.net © 1998 -
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