Les conférences Tavistock
Devant une majorité de médecins thérapeutes, Jung expose les concepts qui ont trait à la psychologie analytique.
Ces cinq conférences ont été données du 30 septembre au 4 octobre 1935 à la Tavistock Clinic de Londres.
Jung rappelle ce qu'est la psychologie :
"La psychologie est avant tout
une science de la conscience. En second lieu, c'est la science des productions
de ce que nous nommons la psyché inconsciente. Nous n'avons pas les moyens
d'explorer directement la psyché inconsciente du fait que l'inconscient est
précisément inconscient, ce qui fait que nous ne pouvons pas communiquer avec
lui."
Quelques lignes plus loin : "Quoi que nous puissions dire sur l'inconscient, c'est notre esprit conscient qui le dit. La psyché inconsciente, qui est de nature totalement inconnue, ne peut jamais s'exprimer que grâce à la conscience et dans son langage. Il est impossible de faire autrement. C'est insurmontable et il nous faut donc garder cela présent à l'esprit comme une ultime réserve à notre jugement."
Jung revient longuement sur les types psychologiques et en particulier sur les quatre fonctions : "La sensation nous dit qu'une chose est, la pensée ce que c'est, le sentiment la valeur qu'elle a pour nous." L''intuition s'ajoute à ces fonctions, Jung précise : "On pourrait croire que notre vision du monde est complète quand nous savons qu'une chose est là, ce qu'elle est, et quelle valeur elle a. Pourtant il nous manque encore une dimension : c'est le temps. Les choses ont un passé et un futur ; elles viennent de quelque part et vont quelque part. De cette réalité nous ne pouvons pas avoir une connaissance claire, mais nous en avons l'intuition."
Il est bien difficile de décrire l'intuition. "Tout ce que je peux dire, c'est que l'intuition est une sorte de perception qui ne passe pas vraiment par les sens mais par l'inconscient, et là je m'arrête, parce que je ne sais pas comment ça marche" nous dit Jung.
De nombreux rêves sont exposés, ils donnent l'occasion à Jung de préciser son approche. "J'appréhende le rêve comme s'il s'agissait d'un texte que je ne comprends pas bien, disons un texte latin, grec ou sanskrit, où certains mots me sont inconnus, ou dont le texte est fragmentaire. J'ai alors tout simplement recours à la méthode courante qu'un philologue appliquerait dans un tel cas. Mon idée est que le rêve ne cache rien ; simplement nous ne comprenons pas son langage."
Il établit un lien entre la complexité d'un individu et ses rêves. "J'ai remarqué que les rêves sont aussi simples, ou aussi compliqués, que l'individu lui-même, et qu'ils sont seulement légèrement en avance sur la conscience du rêveur." Il ajoute "Les rêves sont la réaction naturelle de l'autorégulation de notre système psychique. [...] Ils sont aussi multiples et imprévisibles que les réactions diverses et variées d'une personne au cours d'une journée."
A propos du métier de psychothérapeute, Jung indique : "La psychothérapie est un métier et je le pratique à ma manière - une manière toute simple, en faisant ce que je considère devoir faire, sans rien chercher d'extraordinaire à montrer. Je n'ai jamais cru un instant avoir absolument raison. En psychologie, personne n'a totalement raison. Il ne faut jamais oublier que les moyens par lesquels on juge et on observe la psyché, sont la psyché elle-même."
Quelques pages plus loin "J'essaie évidemment de faire de mon mieux pour mes patients, mais en psychologie, il est très important que le médecin ne s'efforce pas à tout prix de guérir. On doit être extrêmement vigilant à n'imposer au patient ni sa propre volonté ni ses convictions personnelles. Il faut lui laisser un certain degré de liberté. On ne peut arracher de force les gens à leur destin ..."
L'un des participants questionne Jung au sujet de la perfection. "Courir après la perfection relève d'un idéal élevé. Personnellement, je préfère dire : « Réalise ce que tu peux réaliser plutôt que de courir après l'impossible. » Nul n'est parfait. [...] La seule chose que nous puissions vraiment faire est de lutter pour parvenir à un certain accomplissement de soi et devenir des êtres aussi complets que possible ; c'est déjà suffisamment compliqué."
Le transfert occupe une large place dans la relation psychothérapeutique mais il n'est ni nécessaire, ni obligatoire. "Un transfert est toujours un obstacle ; ce n'est jamais un avantage. On guérit malgré le transfert, pas grâce à lui. [...] Certains confrères, je regrette d'avoir à le dire, travaillent pour qu'il y ait un transfert, car, je ne sais pourquoi, ils sont convaincus que le transfert est utile et même nécessaire au traitement. Par conséquent les patients doivent faire un transfert. Évidement c'est une idée totalement fausse."
Quelques lignes plus loin "Transfert ou pas transfert, cela n'a rien à voir avec la guérison. Ces projections sont simplement dues à un état psychique particulier, et, de même qu'on fait disparaître les projections en les rendant conscientes, on doit également faire disparaître le transfert en le mettant à jour lui aussi. S'il n'y a pas de transfert tant mieux. On obtient le matériel de la même façon. Ce n'est pas ce mécanisme qui permet au patient de faire sortir le matériel ; on obtient des rêves tout ce dont on a besoin pour travailler. Les rêves apportent ce qui est nécessaire."
Jung compare les religions avec la psychothérapie. "Et que sont les religions ? Ce sont des systèmes psychothérapeutiques. Que faisons-nous, nous autres psychothérapeutes ? Nous essayons de soigner la souffrance de l'esprit humain, de la psyché humaine ou de son âme. Or les religions s'occupent de la même chose."
Ce livre est très riche, de lecture facile, il regroupe une foule d'éléments, d'exemples, le tout relié aux principaux concepts de la psychologie analytique. A l'issue des conférences Jung répond aux nombreuses questions des participants.
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