Sur le présent site elle publie des textes repris de sa thèse, des écrits sur Jung et des poésies.
Moments marquants de la série de la rêveuse
Des rêves de la série qui racontent comment la rêveuse va se libérer de son dégout du corps et accepter qu’il ne soit pas une prison de l’âme.
L’ombre maternelle
L’affrontement avec l’ombre ne peut trouver de véritable conclusion, car elle fait partie de la totalité psychique. Pour ce qui est de l’histoire racontée par cette série, la part obscure à éclaircir est l’ombre maternelle qui, depuis toujours, juge, déprécie, décide de ce qui doit être rejeté.
Rendue plus puissante par tout le poids de l’inconscient familial, elle est la nourriture de l’animus négatif. Présente dès la début de la série, elle forme alors une espèce de couple mère-fille, jamais d’accord, dont nous avons un bon exemple au rêve 103 où la révolte se dessine déjà : la fille aime le cru, la mère aime le cuit. La fille trouve délicieux les œufs de la féminité qui dégoûtent la mère. Le fait qu’il s’agit d’un saumon, poisson qui remonte jusqu’à la source pour se reproduire, ajoute à l’intérêt de ce conflit où nous voyons la rêveuse commencer à se séparer de cette pesante ombre maternelle.
La Rêveuse mange un beau saumon sous le regard dégoûté de sa mère. Il y a à l’intérieur des oeufs encore crus qu’elle trouve délicieux et les deux femmes ont une vive discussion au sujet du cru et du cuit. Plus tard elle rêve qu’elle dit en public un mot extrêmement grossier qu’elle ne prononce jamais.
Au Rêve 47, il avait été montré que, pour qu’une conjonction soit possible, il fallait soigner la mère. Cependant, même silencieuse, elle demeure comme le montrent les rêves 108 et 125. Pour que finisse l’histoire, au rêve 145, il faut d’abord que la Rêveuse coupe, au rêve 132, le cordon ombilical qui la relie à l’inconscient familial et aussi qu’elle entreprenne, au rêve 143, de laver les pieds de sa mère, c’est à dire de la racine de l’ombre maternelle. La manière de soigner la mère est tout à fait radicale puisqu’elle l’expédie joyeusement vers une mort certaineau Gouffre del’Enfer. Il aura fallu toute la série pour arriver à ce résultat 1.
La Rêveuse est dans un hôpital où sa mère est soignée à sa place et doit rester au lit pendant qu’elle peut se promener dans les couloirs. Elle rentre dans une chambre à deux lits dans laquelle il y a un couple. Ils sont assis avec à leurs pieds un moïse qui contient deux minuscules bébés. L’un d’eux a un bonnet à fanfreluches et les parents lui disent : «C’est un garçon et une fille». Puis elle voit, sous un lit, à peine visible un troisième bébé. Les parents disent : «Oui, ce sont des triplés».
La Rêveuse est d’abord dans une «sorte de boîte de nuit», à une table ronde, avec sa meilleure amie. L’amie la quitte pour monter un escalier vers un «cercle de jeu». Ensuite elle quitte cet endroit avec son chat qu’elle enferme dans le coffre de sa voiture. Il y a toute une histoire de clés avec un homme qu’elle reverra ensuite quand il lui rapportera son chat oublié dans la voiture. Elle rentre chez elle où son mari l’attend l’air un peu gêné. En effet, sur le mur blanc de la chambre se détachent en noir, comme sur une fresque quatre représentations de phallus. Son mari dit : «Je ne comprends pas comment c’est venu là, je n’ai rien à voir avec ces phallus».
La Rêveuse est alors dans l’appartement avec trois autres personnes, son mari, l’homme serviable, elle se rend compte que c’est le Compagnon, qui a rapporté le chat et sa mère, silencieuse et qui semble habiter là. Soudain, il y a un grésillement des fils électriques, des étincelles et une odeur de brûlé puis un grand bruit. Ils se précipitent pour voir que le plafond de la salle de bains s’est effondré et que le couple des voisins du dessus est tombé chez eux, apparemment sans dommage car ils sont debout.
La Rêveuse et le «Compagnon» montent des marches recouvertes d’un tapis rouge pour recevoir un prix. Sur une longue table, à droite, il y a le prix qui consiste en un gros pain rond découpé en tranches et douze croissants disposés autour. La mère de la Rêveuse, silencieuse, est là. La Rêveuse, avant d’aller chercher le prix, se dirige vers une table beaucoup plus petite à laquelle est assis un homme inconnu qui mange du pain. Elle lui demande : «Est-ce-que je peux partager votre pain ?» Il accepte et la Rêveuse contente de partager ce pain demande à l’homme : «D’où venez vous ?» Il lui répond : «Je suis canadien».
Cela se passe dans une cuisine. Quatre personnes, deux hommes et deux femmes, parlent d’une voix forte pour décider la Rêveuse à faire quelque chose. Elle les entend mais a du mal à comprendre ce qu’ils veulent. Finalement, elle va dans un coin où tout est très sombre. D’une cuvette remplie d’un liquide rougeâtre et visqueux sort une sorte de cordon de chair rose et vivante dont la vue provoque chez la Rêveuse une grande répugnance. Elle prend alors sur le comptoir de la cuisine une grande paire de ciseaux rouges et coupe le cordon.
Une belle plage ensoleillée de sable doré où la Rêveuse voit deux cordées parallèles d’hommes et de femmes africains habillés de vêtements très colorés qui tirent de lourds filets hors de la mer. Chaque groupe verse le contenu du filet au centre et cela fait une belle pyramide de poissons aux écailles brillantes.
Ensuite, la Rêveuse est avec un couple d’amis très proches. Elle fait ses bagages pour aller se reposer dans un château-hôtel, accompagnée du petit garçon qui avait apporté les cadeaux (rêve 4 première partie). On lui demande: «Ce ne sera pas difficile de loger avec l’enfant ?» et elle répond : «Au contraire, au lieu de m’attribuer une petite chambre on m’en donnera une plus grande». Elle se retrouve dans un «lieu de vie» et va vers une sorte d’antique infirmerie où une femme âgée habillée de blanc, teint rose, ronde, «la grand mère idéale», est assise sur une chaise. Il y a aussi un homme en habit marron de moine. Tous deux rient et plaisantent. Elle pense alors qu’elle doit «aller laver les pieds de sa mère». L’enfant l’aide à porter une outre ronde en toile dans laquelle il y a de l’eau. Elle part laver les pieds de sa mère mais s’aperçoit qu’il n’y a pas assez d’eau et retourne faire remplir l’outre par l’homme qui en met tellement qu’elle est tout humide à l’extérieur. La Rêveuse lui dit en riant: «Ce coup ci c’est trop». La femme dit : «Il faut en enlever un peu». Avec l’aide du petit garçon elle renverse un peu d’eau dans un bac en grès et ils partent tous les deux laver les pieds de la mère de la Rêveuse.
La Rêveuse est avec sa mère sur une plage à marée basse. La mère est très désagréable, exigeant sans cesse qu’on l’aide. La Rêveuse en a assez et dit: «J’en ai marre, je rentre» quand elle aperçoit le mari d’une amie longeant à bicyclette le chemin qui borde la plage. Elle lui demande: «Où vas-tu ?» et il répond : «Au Gouffre de l’Enfer». Elle lui demande s’’il ne peut pas emmener sa mère sur sa bicyclette et il répond : «C’est un endroit dangereux pour une femme âgée» ce à quoi elle réplique joyeusement : «Ca n’a pas d’importance».
Plus tard elle est en train de parler, dans une chambre à un grand lit, à un homme assis dans un un fauteuil. Elle pense qu’ils seraient mieux au lit et ils se couchent, elle se love contre lui et se sent très bien car elle le trouve extrêmement moelleux, un peu comme un édredon. A côté elle entend le bruit d’une machine à laver qui contribue à son état de béatitude.
Se libérer du corps
L’histoire, commencée au rêve 1, de la résistance au fait d’habiter une enveloppe corporelle, histoire qui révèle finalement un refus d’accepter sa naissance, et un désir de se libérer de l’incarnation pour retrouver la vie de l’âme, se poursuit au rêve 5 où le papillon, symbole de grâce et de légèreté, est devenu énorme et gras comme un animal. Il est plein de chair et de graisse et nous voyons là tout le ressentiment de la Rêveuse qui tape avec violence sur une image de l’incarnation que son point de vue aliéné voit comme la cause de ses blessures et de ses difficultés.
La Rêveuse est devant une paroi de pierre, lisse comme une cloison, avec un trou rond qui donne sur on ne sait où, un autre endroit.
De l’autre côté du trou, dans lequel la Rêveuse a engagé la partie supérieure de son corps pour essayer de passer par le trou, se trouve un homme inconnu très séduisant, l’imagine la Rêveuse car elle ne voit pas le visage de cet homme. Derrière elle, il y a la présence discrète de son mari et d’une femme mûre d’allure très dominatrice et à la voix autoritaire qui s’agite beaucoup. Elle crie: «Vas-y, fais un effort, empotée». La tête et les épaules de la Rêveuse passent mais la partie inférieure de son corps est coincée. Elle sent que si elle s’arrachait la peau, si elle n’avait pas peur de se faire mal elle arriverait peut-être à passer mais elle bloque.
L’homme, de l’autre côté de la paroi, encourage la Rêveuse, tend ses bras vers elle, prend ses mains pour essayer de la tirer. Pendant ce temps la femme autoritaire continue à se manifester. Cela énerve la Rêveuse qui sort du trou et dit: «Tu n’as qu’a passer toi !» La femme répond avec une curieuse modestie : «Comment veux -tu que j’y arrive si tu n’y arrives pas».
La Rêveuse est chez un médecin. Il va lui chercher un extrait de vinaigre. Elle se rhabille trop vite et le pan de sa ceinture s’envole vers le plafond. Pour le faire retomber, elle prend un torchon et tape dessus. Quand il arrive vers le sol elle s’aperçoit que c’est, en fait, un énorme papillon, gras comme un animal. Alors qu’il est à terre elle donne encore des coups de torchon. Elle voit qu’il vit toujours mais qu’elle lui a abîmé les ailes. Elle est alors prise d’une honte terrible car la porte s’ouvre et elle voit passer un chat ou un chien. Elle se dit alors: «Mon Dieu ! il ne peut plus voler, il va être dévoré vivant par terre !» Elle se réveille très émue.
Il faut noter au sujet du rêve 5, et cela sera valable pour l’ensemble de la série, que la pensée (terme freudien) du rêve n’est pas unilatérale. Généralement, un autre point de vue est proposé. Ici, la Rêveuse se rend compte de l’horreur de son geste. Elle craint la mort définitive de cette chair, d’autant plus que, dans le rêve arrive un chat qui risque de dévorer le papillon. Cela suscite une forte émotion.
L’impressionnant rêve 38, âmes sensibles s’abstenir, met en scène une possibilité de brûler, dissoudre, ces corps dont seules les têtes conservent encore un peu de vie. Cette terrible vision a été précédée, au rêve 32, d’une possibilité de monter au ciel en empruntant de gigantesques monte-charges. Tout ceci est très dangereux, et reflète un dramatique oubli de notre condition d’êtres biologiques.
La Rêveuse est dans un grand champ vert avec d’autres personnes. Il y a quatre gigantesques monte-charge ouverts. Ils sont destinés à monter vers le ciel. Elle sait que pour les prendre il faut mettre de l’ordre, respecter les règles.
La Rêveuse est avec un inconnu dans un endroit où il y a des gens enterrés dans la chaux vive. Seule les têtes dépassent avec des expressions de souffrance atroce et elle s’aperçoit avec horreur qu’il y en a qui sont vivantes. Elle dit : «C’est affreux ! il faut abréger leurs souffrances avec une balle de revolver dans la tête.» Ce à quoi il répond : «Non , il faut beaucoup de morphine pour qu’ils aient le temps de mourir comme il faut.»
Une nouvelle illustration de ce point de vue se trouve au rêve 88, où se produit le massacre du grand chien, symbole de la vitalité, de l’instinct. Cette violence, l’acharnement sur les pattes, évoque une destruction de tout ce qui concerne la relation à la terre, au monde vivant.
La rêveuse est devant un tribunal où un juge l’oblige malgré une forte résistance à témoigner de ce qu’elle a vu. Elle dit que si elle témoigne ce sera horrible car elle devra revivre les événements comme si ils arrivaient au moment même.
La Rêveuse est sur une route et, à un virage, elle voit sur le côté droit de la route quatre hommes jeunes qui se sont emparés d’un grand chien. Ils le maintiennent et avec le tranchant de la main ils lui cassent tous les os, surtout ceux des pattes. Ensuite ils jettent le chien sur la route devant la Rêveuse.
Ces scènes pénibles, destinées à offrir une représentation de la mauvaise relation entre la rêveuse et son corps, sont compensées par des rêves qui vont, progressivement, faire gagner du terrain au positif sur le négatif.
Dans la première partie, le discours du rêve, par l’intermédiaire de la Grande Voix, donnait déjà, au rêve 65, une clé avec les mots : Il y avait la source. C’est la parole d’une antique Nature annonçant une grande perte. Il y avait en la Rêveuse une qualité d’être humain biologique, une réussite de la Nature, qu’elle n’incarne pas. Elle est un désert où la source s’est tarie.
UNE VOIX dit à la Rêveuse: «Il y avait la source».
La chair n’est plus une prison
La progression s’amorce au rêve 113 qui marque le début du renversement de la tendance. La scène raconte une hésitation entre le côté humain et le côté animal. Il faut, à ce stade, sortir d’une expression de l’être trop raffinée par le mental, accepter le côté animal en tant qu’énergie brute, et y voir de la beauté. Cette phase surmontée mérite une récompense.
On sonne à la porte. La Rêveuse va ouvrir et découvre un «être féminin» très étrange moitié humain, moitié chat. L’être a du mal à parler, son corps est «incertain». Cette créature inspire la compassion et dit péniblement: «Je…voudrais …rentrer…faim… soif… besoin d’amour…». La Rêveuse et son mari la font rentrer, la nourrissent et l’abreuvent et alors elle parle de plus en plus clairement, ses yeux deviennent magnifiques et elle devient un grand beau chat d’un blanc lumineux. Ils décident de la garder avec eux.
La Rêveuse va recevoir, au rêve 116, un disque intitulé Berceuse du Chant de la Nature. Ainsi, la Nature n’est plus terrible mais prête à accueillir, à tenir dans ses bras, à devenir le berceau d’un enfant accueilli avec douceur par une mère aimante. L’acceptation de l’incarnation s’amplifiera au rêve 123 au moment où elle nage seins nus, ce comportement ayant été proposé au cours d’un déjà ancien rêve programme, le rêve 34.
La Rêveuse est avec quelqu’un, de sexe indéterminé. Ils voient sur la route deux hommes allant l’un vers l’autre. L’un des hommes est habillé «comme un sage». L’autre va vers lui, il se prosterne et lui baise les pieds. La personne qui est avec la Rêveuse dit: «ça ne se fait plus beaucoup de nos jours de saluer comme cela».
La Rêveuse est avec une jeune fille qui apprend la musique. Elle trouve qu’elle lui est «trop attachée» et lui présente un beau jeune homme. Ensuite elle se retire dans une chambre éloignée, entendant des échos de la vie qu’ils mènent dans le grand salon. Elle a de leurs nouvelles par une femme inconnue qui vient la voir. Elle entend le bruit lointain du piano et de la voix et elle «sait» qu’ils font l’amour.
La jeune fille devient une grande chanteuse et la Rêveuse une femme âgée à laquelle, après bien des années, la femme inconnue apporte un disque laser dans une boite carrée transparente. «On» dit à la Rêveuse: «C’est un disque de la jeune fille qui chante et ça s’appelle Berceuse du Chant de la Nature». Elle sort alors de sa retraite et va dans le salon. En arrivant elle entend le chant magnifique de la jeune fille mais c’est vers le jeune homme, habillé d’un costume sombre, qu’elle va. Elle tombe dans ses bras en pleurant de joie et prend son visage entre ses mains. Il est marqué de petites cicatrices.
La Rêveuse est avec son fils et une bande d’adolescents au bord d’un lac. Leur attention est attirée par un homme et une femme qui traversent périlleusement le lac sur un fil tendu entre les deux rives. Ils vacillent, s’accrochent au fil, se remettent debout, avancent, retombent. Elle souhaite ardemment qu’ils ne tombent pas dans le lac et éprouve un grand soulagement quand ils arrivent à l’autre rive. Ensuite elle se retrouve en train de nager, seins nus, avec sur la tête un chapeau rond à large bord. Dans sa main gauche elle tient hors de l’eau des pains qui sont destinés à son fils et à sa bande de copains. Elle arrive au rivage et dépose, sur l’herbe au bord de l’eau, quatre grands pains longs disposés deux par deux en croix.
Un rêve programme est un rêve qui montre clairement le projet de l’inconscient mais qui généralement n’est pas compris parce que le rêveur n’a pas atteint un degré d’évolution suffisant. Ici l’amie que la Rêveuse prenait dans ses bras, comme on prend un enfant, pour la consoler contre ses seins nus, représentait la composante malheureuse de la psyché ayant perdu le contact avec la nature et n’aimant pas son corps. Ensuite, le corps mal aimé est soigné, il devient beau. Il s’agit du corbeau = corps beau du rêve 127 et cela annonce le rêve d’aboutissement.
La Rêveuse est dans la pièce débarras d’une très vieille maison de famille. Dans cette pièce elle a recueilli un corbeau blessé et le soigne. Il est très joueur et le chat fait bon ménage avec lui. Le corbeau se porte de mieux en mieux et un jour elle le trouve perché sur la table en bois lissant, l’air satisfait, des plumes d’un vert brillant. Avec surprise elle s’aperçoit que dans la niche du chat il y a neuf superbes chiots sur lesquels veille, «hiératique comme une statue égyptienne» une chienne Terre Neuve marron.
Cependant, le combat de l’acceptation de l’incarnation n’est pas encore gagné, et nous assistons à un retournement, car le mental défend ses privilèges. Il s’agit du rêve 141, où la Rêveuse essaie, une fois de plus, de s’échapper par le haut. Elle voudrait descendre des hauteurs de la station orbitale où elle se trouve, mais elle est très encombrée par les bagages symbolisant la prédominance de l’accumulation des connaissances intellectuelles.
La Rêveuse est dans une station orbitale. Elle a de gros problèmes avec ses bagages et craint de ne pas être prête à temps pour prendre la dernière fusée de retour vers la terre. Elle est conseillée et aidée par une «servante» très gentille. Il y a des problèmes de jalousie et de commentaires désobligeants avec des femmes qui, au sujet de produits de beauté, se moquent d’elle en lui disant: «Pour toi, ce n’est pas la peine, tu n’es pas coquette». Sa grande inquiétude reste de ne pouvoir quitter la station alors quelqu’un lui dit: «Tu peux être enfermée mais ton âme ne risque rien» . Cela la rassure. Ensuite elle est devant une grande baie en verre, regardant à l’extérieur ce qui, finalement, est une planète et non l’espace. L’éclairage du ciel est du bleu d’une nuit claire . «Il y a des sortes d’étoiles filantes qui tombent vers le sol et un tout petit bonhomme les pêche, avec un filet à papillon, avant qu’elles n’arrivent au sol». Ce spectacle ravit la Rêveuse.
Plus grave, une voix tentatrice lui dit, alors qu’elle envisage l’impossibilité de redescendre : Tu peux être enfermée, mais ton âme ne risque rien , ce qui signifie que l’âme est enfermée dans un corps, et que l’incarnation est la prison de cette âme.
Heureusement pour le dénouement de l’histoire, un renversement se produit : la Rêveuse s’est trompée, elle est finalement bien enracinée sur la terre d’une planète. Tout est beau, et on pêche avec un filet à papillons. L’énorme papillon gras du rêve 5 est devenu une étoile filante. La chair est ainsi magnifiée, ce n’est plus une prison et l’on comprend que la Rêveuse soit ravie. Après avoir surmonté le dernier obstacle, elle va maintenant pouvoir accueillir sa propre naissance.
La Rêveuse est chez un médecin. Il va lui chercher un extrait de vinaigre. Elle se rhabille trop vite et le pan de sa ceinture s’envole vers le plafond. Pour le faire retomber, elle prend un torchon et tape dessus. Quand il arrive vers le sol elle s’aperçoit que c’est, en fait, un énorme papillon, gras comme un animal. Alors qu’il est à terre elle donne encore des coups de torchon. Elle voit qu’il vit toujours mais qu’elle lui a abîmé les ailes. Elle est alors prise d’une honte terrible car la porte s’ouvre et elle voit passer un chat ou un chien. Elle se dit alors: «Mon Dieu ! il ne peut plus voler, il va être dévoré vivant par terre !» Elle se réveille très émue.
La vision 149 constitue le dénouement, heureux, de l’histoire douloureuse et conflictuelle de l’incarnation mal acceptée de la Rêveuse. Il y a là toute la représentation 2 de l’état antérieur de sa relation à la vie biologique, et de la transformation qui s’est opérée au sein de son psychisme. Elle passe ce trou qui lui était fermé au premier rêve . Par un déferlement d’amour, le Qu’elle est belle! transforme cette naissance inhumaine et solitaire, cette vulve et ces mains anonymes, cette supplication devant l’horreur que représente l’incarnation, en un moment de lumière et de pur bonheur.
Elle voit soudain devant elle une vulve de femme qui s’agrandit, s’agrandit, jusqu’à ce qu’apparaisse l’arrière de la tête d’un enfant. C’est d’un réalisme extraordinaire. Il y a le sang, les liquides collés. La tête sort l’enfant étant sur le dos, le visage un peu aplati. Les bras se lèvent vers le ciel et il y a des mains anonymes qui sont sous les épaules. Soudain elle SAIT qu’elle est en train d’assister à sa propre naissance et qu’il n’y a personne pour accueillir cet enfant qui lève les bras au ciel en un geste de regret. Elle se met à pleurer puis quelque chose la pousse à dire: «Qu’elle est belle ! » et à ressentir plein d’amour envers cet enfant. Tout est alors envahi par une éblouissante lumière et la Rêveuse est remplie de bonheur.
Le fait qu’il s’agisse d’une vision hypnagogique, c’est à dire d’un état de conscience particulier intermédiaire entre celui de la veille et celui du sommeil, donne encore plus de valeur à la scène, parce qu’elle est reçue dans un état assez proche de la conscience. Nous pensons que l’éblouissante lumière symbolise la conscience éclairée et que cette acceptation de l’incarnation dépasse les limites de l’histoire onirique, de par l’intégration de l’enseignement du rêve au niveau de la vie consciente.
On rencontre aussi la mère aux rêves 14, 21, 56, mais, comme ombre, elle est surtout une présence “latente” au sein de rêves comme le 24 où on trouve une madame X avec qui elle est fâchée dans la vie. ↩
des éléments avaient été distribués tout au long de la série : les minuscules bébés du rêve 47, bébés de la dualité, le troisième, le résultat de l’exercice de la fonction transcendante, étant caché sous un lit ; l’inoubliable sourire du nouveau-né, la petite Aurore du rêve 73, l’essai d’élaboration d’une vision satisfaisante, qui se révèle très négatif, au rêve 106 avec un visage sans corps de nouveau né tout fripé , le tout étant associé à un poing. ↩
Cheminant dans les pas de Jung, j’ai tenté de donner à penser que l’on peut, par l’intermédiaire des série de rêves, observer les re-présentations structurelles et symboliques d’un enseignement de l’inconscient … Lire la suite