Il faut apprendre à lire les messages que la Nature envoie par l’intermédiaire de l’inconscient.
Un centre vide
Les deux illustrations alchimiques de cette page rappellent ce que nous avons écrit dans le texte précédent.
Elles se situent dans une ambiance de mort et de destruction propre à certaines phases de l’Œuvre. La première (éditée en 1624) décrit la putrefactio, et montre des tireurs à l’arc visant une cible. La seconde est une version gravée sur bois du Rosarium. Elle montre la lune transperçant son époux ailé, le soleil. Il descend dans une sorte de puits où on se demande s’il ne cherche pas à se réfugier !
Cette représentation d’une femme, tirant à l’arc sur un homme, présente des similitudes avec la première partie du rêve 59 de la Rêveuse.
Rêve no 59 : l'afficher
Le rêve 58 derecherche du centre a eu un effet sur la vie quotidienne de la Rêveuse puisque après ce rêve elle se sent beaucoup mieux. Probablement parce qu’il représente, pour l’ensemble de cette première partie, ce qui se rapproche le plus d’un mandala, au sens jungien du mot.
Rêve no 58 : l'afficherRemarquons le point de ressemblance entre ce mandala et l’emblème XXI de l’Atalante fugitive qui est l’illustration d’une de nos pages intitulée : La quadrature du cercle. Dans le cas du rêve 58, le cercle est bien inséré dans un carré, mais le centre est vide ce qui est le cas, avait remarqué Jung, pour la plupart des mandalas modernes.
Un condensé de symbolique alchimique
Sur le plan alchimique qui nous intéresse, le caractère de totalité du rêve apaisant 58 découle du fait que tous les cercles ont des bandes de couleurs diverses et que le grand cercle est inséré dans un carré blanc.
Nous avons, là, une sorte de condensé de symbolique hermétique .
Le cercle quadraturé représente, selon les alchimistes, ce qui se rapproche le plus de la nature de la Pierre philosophale. Cette pierre unit en elle toutes les couleurs et l’ensemble des couleurs, nommé cauda pavonis, la queue du paon, se fond en une couleur unique, le blanc.
On peut donc considérer que le mandala spontané de la Rêveuse, est une allégorie du passage à l’albedo (au blanc) stade de l’Œuvre considéré par nombre d’alchimistes, comme étant déjà une grande récompense de leur labeur.
Le thème du vase en alchimie
La deuxième partie du rêve 59, illustre l’idée d’une catena aurea (chaîne d’or) prolongeant ses maillons jusqu’à l’inconscient d’une femme contemporaine.
En effet, au moment où la Rêveuse doit désigner l’objet désiré, parmi ceux d’une loterie, c’est un vase en cristal qu’elle choisit. Or, le vase ainsi choisi n’est pas, pour les pratiquants de la Science Hermétique, un simple instrument de leurs opérations. Comme l’écrit Jung (p. 305 sq) dans Psychologie et alchimie :
Pour les alchimistes, le vase est quelque chose de véritablement merveilleux : un vas mirabile (vase merveilleux). Marie la Prophétesse dit que tout le secret réside dans la connaissance de ce qui a trait au vase. On souligne sans cesse que : “Unum est vas” (Le vase est un.) Il doit être complètement rond en imitation du cosmos sphérique, de façon que l’influence des étoiles puisse contribuer au succès de l’opération. Il est une sorte de matrice ou d’utérus d’où doit naître le filius philosophorum (fils des philosophes). C’est pourquoi il est aussi recommandé que le vase ne soit pas seulement rond, mais qu’il ait la forme de l’œuf. On est porté tout naturellement à considérer ce vase comme étant une sorte de cornue ou flacon ; mais on se rend bientôt compte que cette explication est insuffisante car le vase représente plus une idée mystique, un véritable symbole, comme toutes les notions importantes en alchimie.”
Notons la comparaison du vase hermétique avec un utérus où mûrit le “foetus spagyrique”, l’homunculus. Ceci conforte l’idée que l’opus est une “analogie de la nature” et l’Œuvre comparable à une grossesse.
Le fait que le vase soit en verre, nous verrons que ce n’est pas toujours le cas, permet à l’alchimiste de voir, par transparence, des transformations de couleurs, des formes étranges, souvent animales, qui ne sont pas sans rappeler l’univers onirique. Le vase de la Rêveuse est particulièrement limpide, puisqu’il est en cristal.
Voir les rêves de la série de la rêveuse
Conseils de prudence de la Mère Alchimique
Toujours au cours de ce même rêve 59, après le choix du vase, revient le problème des degrés de cuisson.
« Il ne faut pas tourner trop fort le bouton d’allumage »
dit cette femme, souvent présente aux côtés de la Rêveuse, femme que nous avons tendance à personnifier comme la Mère Alchimique où la Grande Mère de la Nature, ce qui est à peu près la même chose.
Ceci est en relation avec la recommandation des alchimistes de ne pas détruire la matière première de l’Œuvre par une cuisson ou une purification trop violente.
On pourrait, psychologiquement, interpréter ces paroles comme une mise en garde de ne pas laisser les contenus inconscients passer trop rapidement de l’ombre à la lumière. En effet, la cuisson, qu’elle soit alchimique ou psychologique, doit s’effectuer à feu doux.
Le rêve 60 ne fait que répéter, avec plus de force et de clarté, la fin du rêve 12. La Mater Alchimia, s’adressant à la Rêveuse, lui dit des choses importantes et lui donne des conseils mais, une fois de plus, rien ne passe au niveau conscient et elle oublie ces paroles.
Rêve no 60 : l'afficher
Rêve no 12 : l'afficher
La roue symbole de l’Œuvre alchimique
La vision hypnagogique d’une immense roue qui tourne (61), marque la continuité des manifestations de la symbolique alchimique.
Vision hypnagogique no 61 : l'afficher
La roue symbolise la suite des opérations de l’Œuvre hermétique. Selon le Dictionnaire Mytho-hermétique (cf.p.443), tourner la roue c’est observer le régime du feu. Quand on recommence plusieurs fois les opérations, on fait circuler la roue. Enfin, la roue élémentaire des sages désigne la conversion réciproque des éléments terre, eau, air et feu.
Le problème est celui de la multitude d’humains nus accrochés à cette roue.
On peut suggérer que ces humains nus représentent ceux qui, après les nombreuses distillations et épurations, se sont dépouillés de toutes les formes d’apparence. Ils sont nus, non pas d’une nudité honteuse, mais glorieuse. Ils ont retrouvé leur être originel, naturel et spirituel.
On peut trouver d’autres interprétations mais nous pensons, comme Jung, que cette totalité ne peut se retrouver qu’au moyen du passage par l’ultime transmutation : la mort.
Quelques progrès de la Rêveuse dans l’écoute de l’inconscient
Le rêve 62 poursuit le thème de la grossesse du rêve 40, et annonce le rêve 73.
Rêve no 40 : l'afficher
Rêve no 62 : l'afficher
Rêve no 73 : l'afficher
On note des évolutions : tout d’abord, la Rêveuse a quitté son déguisement masculin, ensuite, elle a un rôle actif.
Elle écoute la voix qui dit : il faut aller chercher la femme. Cette femme est enceinte et, pour obéir à l’injonction, la Rêveuse va vers la mer. Une mer généralement assimilée par les alchimistes aux quatre éléments et au mercure.
Autre progrès, il existe un géniteur. Il se trouve malheureusement en piteuse forme car il souffre d’un malaise, correspondant, probablement, à ce moment de la vie onirique de la Rêveuse, à un mal à l’aise.
En guise de compensation onirique symbolique, arrive le soleil, le père de la pierre des sages, dont, rappelons-nous, la lune est la mère.
Il faut apprendre à lire
La Mater Alchimia, en personne, se présente au rêve 63.
Rêve no 63 : l'afficher
On quitte le domaine rationnel, de ce qui est vraiment officiel pour celui de l’intuition. Les changements annoncés, et ceci est en accord avec les précédentes recommandations au sujet de la cuisson lente, doivent être préparés avec douceur.
On va, maintenant, utiliser le Grand livre de l’Inconscient Collectif, consulter les Archives Akashiques de la Tradition et dans ce but il faut apprendre à lire, c’est à dire à savoir interpréter l’enseignement de l’inconscient.
Le Grand Livre, en symbolique hermétique, est le Livre des plus mystérieux secrets de la Nature. C’est un Livre non écrit, recélant les Secrets des Sages. Il ne peut être décrypté que par l’homme d’exception qui a mené l’Œuvre jusqu’au dernier stade du processus, c’est à dire au Rouge.
La Grande Voix parle avec force
La Rêveuse n’était pas présente au Rêve 63, qui donnait l’impression que l’inconscient parlait dans le vide. Impression confortée par le rêve 64 où une petite fille se balance dans les airs sur un trapèze.
Rêve no 64 : l'afficher
L’inconscient s’impatiente et, au rêve suivant, la Grande Voix s’adresse à elle avec force pour lui dire : Il y avait la source. Le temps du verbe montre que cette source a été perdue.
Ces paroles sont destinées à indiquer à la Rêveuse sa juste place au sein de la Nature. Elle doit retrouver le sens de la totalité d’où elle est issue pour acquérir l’ensemble de son individualité, inconsciente et consciente, au sein de cette globalité. Dans ce but, il lui faut rétablir une relation avec la Nature, la source, puis se replacer à l’intérieur de cette Nature. Cependant, des précautions doivent être prises pour que sa conscience, ce bien si précieux, reste intacte. Pour cela, de solides appuis sont indispensables, avant qu’elle se lance dans ce cheminement.
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Publié initialement dans le cadre d’une thèse cette page a été adaptée par Ariaga (Ariane Callot), son auteure.
Les ouvrages cités sont référencés à la page bibliographie.