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Lise Villemaire : les chemins qui m’ont menée à cette recherche

Lise Villemaire décrit le cheminement personnel qui l’a conduite à cette étude, en s’appuyant sur les écrits de C.G. Jung et de Giuseppe Tucci, tout en les comparant.

Mon premier contact avec l’œuvre de Jung

Mon premier contact soutenu avec l’œuvre de Jung date déjà de près de 45 ans, en 1980. J’étais alors une jeune étudiante universitaire de 19 ans en formation en tant que psychologue-psychothérapeute au Québec. J’ai assisté à un cours sur Paracelse, un écrit de Jung offert par le professeur de psychopathologie. Auparavant, étudiante infirmière, lors de mon stage en psychiatrie, j’avais lu son écrit sur la schizophrénie.

Et depuis, les idées de Jung m’ont fascinées. Je m’intéresse particulièrement au développement incluant les stades de changement, de transition psychologique et spirituel de l’adulte, décrit en termes jungiens comme le processus d’individuation avec ses symboles, l’art en général, ainsi que le processus de création ou la créativité en général.

Il y a environ deux ans, j’ai commencé une recherche sur le symbole par excellence du Soi, traduisant la totalité psychique, l’être central, intérieur, véritable et unique vers lequel nous tendons, sans jamais l’atteindre complètement ou le réaliser entièrement: le mandala.

Il existe plusieurs écrits sur le mandala. Comme pour tous mes écrits, je tiens toujours à ce qu’ils se réfèrent à des liens entre théorie et expérience personnelle.

Écrits de Carl Gustav Jung et Giuseppe Tucci

Aussi, je souhaitais apporter mon humble contribution en présentant une comparaison entre les écrits de Jung sur le sujet et ceux d’un chercheur qui à mon avis a été assez oublié : Giuseppe Tucci (1894-1984), considéré comme l’un des plus grands orientalistes de son époque.

Doué pour les langues, il a appris par lui-même le sanskrit, l’hébreu et le chinois avant l’âge de 18 ans. Comme Jung, Tucci ne se limitait pas à demeurer à un niveau qu’intellectuel, il allait sur le terrain. Aussi, entre 1928 et 1954 (entre l’âge donc de 34 et 60 ans), il organisa et mena quatorze expéditions dans l’Himalaya indien, dont huit au Tibet occidental et central et environ six au Népal.

Toutes ces expéditions, Tucci les faisait à pied et à dos de mulet à travers les déserts et les montagnes. Il disait que c’était le meilleur moyen pour connaître et découvrir un lieu et sa population. Il expérimenta lui-même une cérémonie du mandala selon le rituel du bouddhisme. Il fonda en 1957 un musée situé en Italie [aujourd’hui intégré au Museo delle Civiltà – Musée des Civilisations – à Rome], qui contient plusieurs artéfacts collectés durant ses expéditions.

 Tucci avait environ dix ans de moins que Jung, mais il en connaissait ses travaux, bien qu’il ait fait des expéditions en Inde dix ans avant Jung, en 1928. Le séjour de Jung a duré environ un mois et demi   en Inde, du 17 décembre 1937 au 1er février 1938). Tucci en avait fait plusieurs sur environ deux décennies.

Dans son livre Théorie et Pratique du mandala  (1969), il rend hommage à Jung en ces termes:

« c’est le mérite de Jung d’avoir reconnu pour la première fois, cette mystérieuse nécessité à l’esprit humain – ces visions et ces fulgurations se disposer dans cette forme précise de rayons, de fleurs, de schémas circulaires et quadrangulaires autour d’une source lumineuse centrale. » 

Après avoir lu et relu des écrits de Tucci et de Jung, pris des notes, j’avais rédigé environ vingt-cinq pages pour résumer les idées de Tucci sur le sujet. Mais depuis un an, je n’arrivais pas à aboutir du même résultat pour Jung, que je connaissais d’ailleurs beaucoup plus que Tucci.

Je pataugeais, je tournais en rond, j’avais beau être à l’écoute des signes intérieurs et extérieurs qui auraient su me guider pour enfin pouvoir épancher un résumé de la pensée de Jung sur le mandala, me questionner sur le pourquoi de quelconques résistances de ma part, en discuter avec des collègues et amis, rien n’y faisait, aucune ligne ne s’écrivait sur la page blanche ! Je me disais que cela était normal vu la grande complexité du sujet et du fait que je ne voulais pas m’en tenir au seul niveau théorique dont il est plus facile d’en structurer le contenu.

Jusqu’au jour où j’ai lu l’article de Claudine Chatelain sur ce site web, intitulé Lilith, démone ou initiée ?.  Mon esprit resta accroché au thème de l’arbre mentionné dans lequel Lilith vivait qui représente un grand symbole du féminin, et qui, avec ses racines et ses feuilles est la vie, la génèse.

Et Lilith vit dans cet arbre de la connaissance et de la sagesse.

Ce fut alors l’illumination, un feu d’artifice qui me faisait comme signe que là, dans ce thème de l’arbre, se trouvait mon fil conducteur pour enfin rédiger mon écrit sur le mandala selon Jung. Toutefois, au tout début, ce n’était pas clair aussi directement, la lumière était trop intense, elle m’aveuglait, même si mon cœur lui savait et battait fort en me disant « Oui, c’est bien par là que tu dois aller ! ».

Mais quand même, l’état de tension qui m’habitait depuis longtemps en regard de cet écrit inachevé s’est dissous en grande partie, j’en ressentis un réel apaisement.

De prime abord, je me sentais comme le centre d’une table de billard, entourée de nombreux joueurs qui lançaient leurs balles vers moi comme moults liens, associations que j’avais accumulés en moi depuis longtemps :

  • des liens avec l’arbre de Vie de la Kabbale,
  • des vitraux représentant un arbre que j’avais peints,
  • et surtout la description d’un rêve que Jung avait fait et dans lequel il était à Liverpool, en Angleterre (mon pays de rêve !) s’était présenté à lui un magnifique arbre magnolia aux fleurs rougeâtres posé au centre d’une petite île, qu’il a représenté dans une peinture d’un mandala qu’il a intitulée: Fenêtre sur l’Éternité, et qu’il avait dédié à son ami Hermann Sigg qui était décédé en 1927,
  • la couleur rose,
  • mon amour pour les roses sauvages et les fleurs en général,
  • la confrérie des Rose-Croix (j’étais en train de lire avec passion le livre de Daniel Brown, Le symbole perdu  dans lequel il en parle ainsi que du symbole très simple représentant Dieu que cette secte  »secrète » utilise : un petit point dans un cercle,
  • et celui du Code da Vinci dans lequel on fait mention du Graal, etc.

Après environ deux jours, le raz de marée des associations s’est calmé pour n’en montrer qu’une en évidence: l’importance et la signification du deuil dans le contexte d’émergence du symbole du mandala.

Mon expérience personnelle

Durant mes lectures des écrits de Jung sur le mandala, j’avais effectivement observé que dans son expérience personnelle, l’expression par dessin, peinture, sculpture, etc. du symbole du mandala, ou toute autre chose en forme de cercle suivait dans une courte période, un deuil qu’il vivait.

Ses premières peintures de mandala dont plusieurs sont figurées dans le Livre Rouge datent de l’époque après sa séparation de Freud vers 1913 (la coupure d’une relation significative peut être considérée comme un deuil), le début de la construction de sa tour (qui est ronde) a été commencée seulement deux mois après le décès de sa mère en 1923, ainsi qu’un ajout central après le décès de sa femme en 1955.

Ce constat m’a touchée parce que j’avais vécu la même chose après le décès de mon conjoint, puis celui de ma mère. J’avais peint plusieurs vitraux qui contenaient des symboles du Soi : des cercles-mandalas, des fleurs, des oiseaux, etc. toutes choses qui représentaient des caractéristiques particulières de la personne chère qui était décédée.

Toutefois, Jung ne fait que mentionner ce lien, sans nous en dire plus sur la signification concrète et approfondie dont cette expérience laisse trace dans la vie de la personne endeuillée qui suit son cours. On peut comprendre tout à fait que cela relève de la sphère intime de Jung et que donc, n’était pas approprié de dévoiler dans un écrit à titre scientifique, professionnel ou autre.

J’estimais être bien placée pour en parler de manière plus approfondie, ayant vécu plusieurs deuils – dont celui de mon conjoint et de ma mère – qui avaient fait l’objet de peintures représentant des symboles du Soi. Et aussi, pendant vingt ans, j’avais accompagné plusieurs personnes en deuil, que ce soit par la perte d’un être cher, d’un emploi ou d’une séparation conjugale, durant ma pratique professionnelle en psychothérapie. 

Je présenterai d’abord en résumé la définition, la nature et les représentations symboliques du mandala selon la conception de Jung, le contexte d’émergence de ces symboles ainsi qu’en dernier lieu, les fonctions, les buts et les impacts de ces symboles dans le processus d’individuation.

Je me suis référé directement et majoritairement aux écrits même de Jung dont particulièrement, son autobiographie Ma Vie, Commentaires sur le Mystère de la Fleur d’Or, Psychologie et orientalisme, Psychologie et Alchimie. Je me suis aussi référé à d’autres auteurs-es dont la très pertinente de  Sulagna Sengupta qui est elle-même originaire de l’Inde et qui a écrit un volumineux livre intitulé Jung in India (2013).

Les connaissances de Jung sur l’Orient

Les connaissances de Jung sur l’Orient datent d’au moins 10 ans avant son voyage en Inde (1937-1938), soit vers 1928. Sulagna Sengupta consacre un chapitre de près de 50 pages à ce sujet. À cette époque (entre 1900 et 1940 environ) l’Europe, au niveau culturel et intellectuel, il existait un engouement pour le savoir de la culture asiatique, en particulier de l’Inde et de la Chine. Non seulement Jung avait lu plusieurs textes hindouistes et bouddhiques, il s’était également entretenu avec des confrères spécialistes du domaine européens et asiatiques.

Pour ne donner que quelques exemples, il avait lu :

  • sur les Upanishads dans les livres de Shopenhauer et de l’indiologiste Max Müller (1823-1900),
  • la vie de Ramakrisna dans le livre de Romain Rolland (1866-1944),
  • les ouvrages d’Ananda Coomaraswamy (1877-1947),
  • Art et Yoga d’Heinrich Zimmer (1890-1943).

Il avait aussi la connaissance :

  • des écrits de maître Eckhart (1260-1320) et de Leibniz (1646-1716) sur les préceptes du bouddhisme et du Yi-King,
  • le Siddharta de l’écrivain Herman Hesse (1877-1922) qui fut également son patient,
  • il s’était abonné au journal de l’Ordre de Ramakrisna (1836-1886).

Jung avait donné une série de conférences sur le yoga de Kundalini en octobre et novembre 1932 au Club psychologique de Zürich.

Sulagna Sengupta mentionne une charmante anecdote: en 1919, alors que Jung était en Angleterre, il rapporta à sa fille Marianne, alors âgée de 9 ans, une poupée en bois sculpté, venant de l’Inde.

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Cette page fait partie de l’article : Le contexte de deuil dans l’émergence du symbole du mandala.

Lise Villemaire, M.Ps.

Lise Villemaire, psychologue et psychothérapeute retraitée, réside à Montréal, province du Québec au Canada. Dans un premier temps elle a travaillé comme infirmière. En qualité de psychologue elle a plus de 25 ans d’expérience de pratique et d’enseignement au niveau universitaire.

Elle a étudié les différentes religions et obtenu un certificat en Théologie Orthodoxe. Conférencière, elle s’intéresse particulièrement au développement spirituel chez l’adulte et à l’Art. Elle s’adonne au dessin et à la peinture de vitraux.

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